Appel à propositions

Démographie numérique et computationnelle : état des lieux et perspectives

 

1. Vue d’ensemble

Depuis ses débuts, la démographie se distingue par ses innovations méthodologiques, développant des outils et des approches sophistiqués pour analyser les comportements démographiques et approfondir la compréhension des dynamiques de population. Comme d’autres sciences sociales, elle a récemment été secouée par l’émergence, puis l’adoption, de méthodes computationnelles ainsi que par l’exploitation de nouvelles sources de données, élargissant ainsi potentiellement sa portée, sa boîte à outils méthodologiques et ses champs d’application. L’étude de la migration a particulièrement bénéficié de ces avancées, mobilisant données massives et numériques pour estimer un phénomène dont la mesure a historiquement posé de nombreux défis à la démographie.

Néanmoins, la discipline et son histoire semblent la placer comme un terrain fertile pour le développement et la consolidation d’une démographie computationnelle. En effet, la démographie s'est toujours démarquée par son recours intensif à des données quantitatives "massives", qu'il s'agisse de recensements, de données administratives ou de grandes enquêtes longitudinales, et par sa capacité à innover dans les outils d’analyse et de traitement pour pallier les imperfections des données. Ainsi, de nombreux défis et aspects de la révolution des données ne sont pas étrangers aux démographes, qui ont depuis longtemps recours à des données populationnelles à grande échelle et qui mobilisent couramment des données imparfaites, initialement collectées pour des fins autres que la recherche.

Cette tradition d'ingéniosité face à la complexité des données confère à la démographie un avantage unique dans l'intégration des approches computationnelles. De plus, ces approches offrent des opportunités inédites pour traiter des volumes massifs de données issues de diverses sources digitales, telles que les traces numériques laissées par les individus sur les réseaux sociaux ou les données de mobilité extraites des téléphones portables. Elles permettent non seulement d'améliorer la précision des estimations démographiques, comme il a été fait pour la migration, mais aussi d'explorer de nouvelles questions de recherche, auparavant inaccessibles. De plus, elles mobilisent de nouvelles techniques, telles que l’apprentissage profond, pour relever des défis méthodologiques de longue date, comme les difficultés récurrentes rencontrées dans les projections de population ou de l’estimation de l’effet causale.

Malgré ces avancées prometteuses, la démographie (surtout francophone) reste à la marge pour intégrer totalement ces nouvelles approches. La question de l'adoption ou non de ces nouvelles approches computationnelles fait écho aux divisions historiques de la discipline. Certains ont longtemps plaidé pour une autonomie disciplinaire accrue, prônant le développement d'outils spécifiquement démographiques et une focalisation sur les phénomènes démographiques traditionnels. D’autres estiment que le succès de la discipline repose sur son ouverture aux autres sciences sociales. Peu importe l’orientation choisie pour la discipline, il semble clair que la démographie aurait beaucoup à gagner en adoptant les approches computationnelles. De la même manière qu'elle a su développer des outils pour traiter des données imparfaites, les données massives, elles aussi imparfaites, représentent une opportunité pour revitaliser la recherche démographique.

Selon Marres (2017)[1], la démographie computationnelle peut être abordée sous trois perspectives interreliées. La première se concentre sur l’exploitation de nouvelles données numériques, qui permettent de suivre les individus dans le temps et l’espace. La deuxième perspective repose sur l’adoption de méthodes empruntées à l’informatique, comme l’apprentissage automatique. Enfin, la troisième perspective met en lumière le rôle actif des fournisseurs de données numériques dans leur production, ouvrant un nouveau domaine de recherche sur les interactions entre individus et technologies. Selon Kashyap et ses co-auteurs (2022)[2], la démographie numérique englobe aussi les recherches sur les technologies numériques et leurs impacts sur les processus démographiques tels que la santé, la mortalité, la fécondité, la formation des familles et la migration.

2. Contributions recherchées

Nous invitons des recherches portant à la fois sur les méthodes de mesure des phénomènes démographiques et sur l’application des approches computationnelles et digitales pour une meilleure compréhension de ces phénomènes. Nous identifions trois manières par lesquelles les contributions peuvent être enrichissantes (Salganik, 2017)[3] : 1) la réévaluation de méthodes existantes, 2) la création de nouveaux outils, 3) ou la combinaison de ces deux approches. Nous sollicitons des contributions sur une variété de thèmes, allant des sources de données des différents phénomènes démographiques et sociales, les méthodes et les orientations futures. Les articles critiques sont aussi les bienvenus. Les contributions peuvent provenir de toutes les disciplines connexes à la démographie (Sociologie, économie, santé publique).

Soumettez un résumé de votre article d'une longueur entre 500 mots et 4 pages au maximum.

Mots-clés :

  • Démographie computationnelle et digitale
  • Sciences sociales computationnelles
  • Apprentissage machine (machine learning)
  • Données massives (big data)
  • Données digitales et numériques
  • Données administratives
  • Médias sociaux

3. Dates importantes

  • Date limite de soumission des résumés : 15 décembre 2024
  • Notification d’acceptation : vont commencer à sortir à partir de 15 janvier 2025
  • Date limite de soumission de la version finale des articles acceptés : 15 juin 2025

4. Directives de soumission

  • Toutes les soumissions doivent être originales et ne pas avoir été soumises simultanément à une autre revue ;
  • La longueur typique d’un manuscrit est au maximal de 11000 mots ;
  • Les soumissions doivent être préparées conformément aux instructions disponibles sur la page d’accueil de la revue, https://cqd.ojs.umontreal.ca/index.php/cqd/about/submissions;
  • Les manuscrits doivent être soumis par voie électronique via le système de gestion éditoriale du journal sur https://cqd.ojs.umontreal.ca/index.php/cqd/about/submissions.

5. Processus de révision

Tous les articles seront évalués par des examinateurs, experts dans le domaine, nommés par les éditeurs invités du numéro en consultation avec l’équipe des rédacteurs de la revue.

  1. Avantages de la publication dans un numéro spécial
  • Grande visibilité auprès de l’audience francophone : les chances de voir son article cité par les pairs est accrus. L’édition spéciale permet aussi de se démarquer comme un acteur important dans le domaine de la démographie computationnelle.
  • Meilleure accessibilité : Les numéros spéciaux renforcent la portée et l'impact de la recherche scientifique. Les articles publiés dans les numéros spéciaux sont plus faciles à découvrir et cités plus fréquemment.
  • Élargissement du réseau de recherche : Les numéros spéciaux facilitent les contacts entre les auteurs et favorisent les collaborations scientifiques.
  • Promotion externe : Les articles des numéros spéciaux font souvent l'objet d'une promotion par l'intermédiaire des médias sociaux de la revue, ce qui accroît leur visibilité.

6. Éditeurs invités

Le numéro spécial sera édité par le directeur des CQD, le professeur Vissého Adjiwanou, département de Sociologie, Université du Québec à Montréal et le professeur Yacine Boujija de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS). Le professeur Vissého Adjiwanou est un pionnier des sciences sociales computationnelles en démographie (francophone). Il a organisé plusieurs écoles d’été et formé plusieurs chercheurs dans le domaine.

Les questions relatives à la soumission, au processus d'évaluation par les pairs ou à l'état d'avancement de votre manuscrit doivent être envoyées aux éditeurs invités professeur Vissého Adjiwanou (adjiwanou.visseho@uqam.ca) ou le professeur Yacine Boujija (Yacine.Boujija@inrs.ca), ou au bureau éditorial des CQD (cahiers.demographesqc@gmail.com).

7. À propos des Cahiers québécois de démographie (CQD)

Fondés à Montréal en 1971, les Cahiers québécois de démographie publient des textes en français portant sur la démographie québécoise, canadienne et internationale. Le principal objectif de la revue est de participer au développement des connaissances dans les divers champs qui touchent au domaine de la démographie, par la diffusion des résultats des travaux de chercheurs œuvrant dans ce domaine. La revue suscite aussi la participation de chercheurs d’autres disciplines intéressées par la mesure, la compréhension, l’évolution et l’impact des phénomènes démographiques qui contribuent au renouvellement d’une population.

Nous attendons avec impatience vos contributions pour enrichir la recherche francophone sur la démographie computationnelle.

 

 

[1] Marres, N. (2017). Digital Sociology: The Reinvention of Social Research (1. édition). Polity.

[2] Kashyap, R., Rinderknecht, R. G., Akbaritabar, A., Alburez-Gutierrez, D., Gil-Clavel, S., Grow, A., Kim, J., Leasure, D. R., Lohmann, S., Negraia, D. V., Perrotta, D., Rampazzo, F., Tsai, C.-J., Verhagen, M. D., Zagheni, E., & Zhao, X. (2022). Digital and Computational Demography. SocArXiv. https://doi.org/10.31235/osf.io/7bvpt

[3] Salganik, M. J. (2018). Bit by bit: Social research in the digital age. Princeton University Press.

 

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